Le Vietnamien est
culturellement attaché à la qualité. Au Vietnam, on vous dit "c'est
extra" (đặc-biệt) ou "qualité supérieure" (hảo-hạng). Dans
tout autre pays, on vous aurait dit "ce n'est pas cher, c'est une
promotion,...". Un Vietnamien est capable de manger un phở dans
un arrondissement, prendre son vélo-moteur et aller déguster un
xinh-tố dans un deuxième et terminer son repas dans un cà-phê
d'un troisième. Il peut passer une demi-journée à examiner sous tous les
angles un meuble avant de se décider à passer le même temps pour faire
de même à la boutique d'à côté.
Peu de gens
savent que le Vietnam exporte la moitié de son PIB. C'est donc parmi les
pays du Monde les plus ouverts à l'exportation. Ses entreprises doivent
donc se soumettre à des normes de qualité contraignantes des pays
clients. Comme, à tort ou à raison, on pense que les marchandises
d'origine vietnamienne sont de mauvaise qualité, il faut que ces
entreprises apportent à leurs clients toutes les garanties nécessaires.
C'est pourquoi, il est quasiment obligatoire d'avoir un certificat ISO
9001 (norme internationale de gestion de la qualité) si l'on veut
exporter. Ainsi, on recense 1.200 certificats ISO 9001 au Vietnam, soit
34 certificats pour un milliard de dollars de PIB annuel. Pour votre
information, la France n'a que 31 certificats par milliard de dollars de
PIB annuel.
La qualité ne
consiste pas à trier après fabrication pour éliminer tous les articles
qui ne conviennent pas. Si l'on se contente de cela, le prix de revient
serait trop élevé car il faudra tenir compte du coût du contrôle de la
qualité, des retouches et des rebuts pour non conformité. Il y a des
techniques de gestion permettant de fabriquer uniquement, ou au moins en
majorité, de bons produits. Ces techniques ont été mis au point par les
Américains avant la Deuxième Guerre Mondiale et les Japonais juste
après. J'ai enseigné ces techniques-là à des amis au Vietnam.
Un beau jour nous
avons eu envie de traduire en vietnamien le livre "Gestion de la
Qualité" de Ishikawa, un des gourous de la qualité japonaise. C'est
un livre qui est édité depuis les années 1950 pour former des ingénieurs
japonais et qui est traduit en 25 langues au moins. Après nous être
renseignés, il s'avérait que les droits d'auteur à payer aux Japonais
mettraient le prix du livre à l'équivalent d'un mois de salaire
vietnamien. J'ai donc été désigné pour rédiger un autre livre sur le
même sujet. J'en ai profité pour l'écrire à la façon vietnamienne et en
profitant des progrès de la pédagogie moderne.
Comme c'est un
sujet que je connais par coeur depuis trente ans, le seul mérite que je
revendique dans cette affaire est de m'être battu pour que le prix de
vente du livre soit inférieur à 30.000 dongs (1,90 euros), l'équivalent
de cinq repas d'un étudiant vietnamien. Devant mes pleurs, mes larmes et
ma promesse d'écrire d'autres livres, l'éditeur a finalement transigé
pour 24.000 dongs (1,50 euros). Les livres vietnamiens de même style
coûtent trois fois plus chers. A mon avis, c'est un racket car les
étudiants doivent acheter tous les livre écrits (des plagiats mal
digérés) par leur professeur pour avoir une chance d'être reçus à
l'examen.
L'éditeur
a imprimé 1.000 exemplaires. J'ai touché l'équivalent de 150 euros de
droits d'auteur, payés comptant, et dix exemplaires gratuits. Ce fut une
agréable surprise car, en Europe, on est payé au fur et à mesure des
ventes. Cela suffisait juste pour payer le transport par bateau d'une
cinquantaine d'exemplaires en France. Je n'avais même pas de quoi
organiser un pot de lancement du livre. Comme dans mes habitudes, j'ai
donc fait une opération financièrement calamiteuse. Mais je me suis bien
amusé.
1 rue du Poisson Bleu, F-92290 CHATENAY-MALABRY, France
Phone : 33-143.50.02.02
Note du Webmaster : Vous pouvez
acquérir ce livre auprès de l'auteur pour 25 Euros,
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