SOIXANTE ANS,  LA SOIXANTAINE

 

La vie durant, soixante ans est-elle une étape ?

Usés, âgés sont-ils out ? ou sages vénérables,

Calmés ou angoissés, résignés, retraités,

La soixantaine est-elle image ou symbole du temps ?

Doit-on s’en émouvoir ou s’en féliciter ?

Ces questions sont éternelles mais cette vie unique.

 

Avoir soixante ans, cela fait deux fois trente ans,

Mais aussi trois fois vingt ans, quatre fois quinze ans

Ou trente fois deux ans et soixante fois un an.

Ces chiffres, un deux trois, quatre trente soixante 

Ne font que tournoyer autour de un,  de soi,

de son identité, de son image, son Moi.

 

A trente ans, les gens se sentent  plus rassurés, mûrs.

Ils ont appris un métier, prennent des habitudes.

Actifs, ils s’installent dans la vie conventionnelle,

intègrent la structure sociale, deviennent adultes.

A soixante ans, ils ont le temps de faire deux tours

Sont-ils mieux? , ou toujours perdus ?

 

A vingt ans, ils sortent de la tutelle parentale

S’affirment et partent à la conquête du monde.

Ils se diversifient, jettent ses empreintes,

De sa coquille ils deviennent jeunes gens.

A soixante ans, ils ont le temps de faire trois tours

Sont-ils mieux ? , ou toujours perdus ?

 

Mais c’est à quinze ans, à l’adolescence

Avec ses muscles et ses réflexes affinés

Que sa conscience s’ouvre à la vie globale,

Comme les fleurs au printemps, le soleil au levant

A soixante ans, ils ont le temps de faire quatre tours

Sont-ils mieux ? , ou toujours perdus ?

 

L’être humain ne sort en fait du monde animal

Qu’avec le développement du langage.

Qu’il acquièrt surtout à l’âge de deux ans.

Il parle, il marche, il cherche à se communiquer.

A soixante ans, il a fait trente fois le tour

Est-il mieux ? , ou toujours perdu ?

 

Cette recherche relationnelle sera éternelle.

L’instinct guide la marche, oriente la vie,

A un an, il quitte ainsi les seins maternels

explore le monde, son monde, son propre soi

A soixante ans, il a fait soixante fois le tour

Est-il mieux, ou toujours perdu ?

 

L’esprit aime les chiffres, les répères, les images,

Et la vie se dessine, la conscience se forme.

Mais l’âme, avec l’inconscience et les intuitions

traverse le temps et l’espace, indépendante,

Ne s’attachant qu’au symbole, elle poursuit son chemin

Avec ce sens indéfini du destin et sa globalité.

 

On a beau avoir soixante ans

Mais a-t-on vraiment évolué, différent ?

Ayant parcouru les années et son monde,

A-t-on perdu son angoisse, renoncé à l’amour?

A-t-on fini de se poser des questions?

Est-ce qu’on est mieux ou pareil ?

 

On a beau avoir un an, deux, quinze, trente, soixante,

On recherche toujours un sourire, une affection,

Années, amis, voyage, et ses mille visions,

N’est ce pas son Soi sous des aspects différents ?.

On aime la différence, le mieux, le mal

Cet  âge est-il mieux ou pareil ?

 

Pour l’esprit, le soleil va de l’Est vers l’Ouest,

Sur ce chemin de la vie, il aime la façon,

ses questions et ses réponses, la fin, le but

La nature environnante les fait-elle autant ou du tout ?

Et les choses passent, et le temps efface,

Est-ce mieux, est-ce pareil ?

 

La vie est-elle de tout savoir et tout avoir ?

Beauté, idéal, ces choses indéfinies ultimes,

Mille fois vues et entendues, mille fois désirés

Ne sont que cette même et immuable nature 

qui se présente à soi à moi à sa conscience,

Est-elle mieux, est-ce pareil ?

 

Dans le silence de la nuit  et sa solitude

Le méditant saura qu’esprit est illusion 

La vie est dans la manière d’être et non son pourquoi.

Avoir soixante, trente, vingt, quinze, deux ou un an

Ne sont qu’images du passé ou projections du futur,

Ce n’est ni mieux, ni pire.

 

La vie est ce qu’elle est et non ce qu’elle devrait

Le temps, les années coulent selon son propre destin

qui nous reste lié comme les gènes, les peurs, les joies

La lune est-elle mieux moitié pleine ou moitié vide ?

Ne pensez plus à soi et tout sera pareil.

C’est à dire ni mieux, ni pire.


 NGUYEN SON HUNG